OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Les nouveaux nouveaux chiens de garde http://owni.fr/2010/09/24/les-nouveaux-nouveaux-chiens-de-garde/ http://owni.fr/2010/09/24/les-nouveaux-nouveaux-chiens-de-garde/#comments Fri, 24 Sep 2010 13:25:48 +0000 Guillaume Henchoz http://owni.fr/?p=29368 Dans un papier commandé par l’INSEAD, Mark Lee Hunter et Luk Van Wassenhove développent l’émergence d’un nouveau modèle économique propre au journalisme. Le regard original des deux chercheurs  ouvre un chantier important  qui permet de donner à la pratique journalistique un nouveau cadre théorique mais pose cependant un grand nombre de questions. Quel est le nouveau socle éthique de cette forme de journalisme ? A qui s’adressent les médias stakeholders ? A quoi ressembleront les chiens de garde de demain ? Au service de qui travailleront-ils ?

« Disruptive News Technologies : Stakeholder Media and the Future of Watchdog Journalism Business Models ». Avec un titre pareil, on peut comprendre que l’étude n’ait pas trouvé beaucoup de relais en francophonie… L’intitulé est déjà tout un programme. L’étude formée d’une quarantaine de pages  a été écrite par un ancien journaliste d’investigation, Mark Lee Hunter, qui a déjà fait l’objet d’un billet sur Chacaille . Ce reporter américain basé à Paris a commencé à se faire remarquer au cours des années 1990. On lui doit notamment un ouvrage un peu pince sans rire sur Jack Lang ( le titre en anglais : The Ministry of fun), une  enquête sur l’affaire Canson et surtout une longue immersion auprès des militants du Front National (un Américain au Front, 1995). Son compère, Luk Van Wassenhove,  est un pur produit de l‘INSEAD dont il occupe la chaire Henry Ford.

L’objectif de cette recherche est de pointer l’apparition et le développement d’une nouvelle source de financement pour les enquêtes journalistiques au longs cours. Les auteurs partent du constat que les médias traditionnels sont de moins en moins enclins à produire de longues enquêtes : le modèle classique des industries des médias décline. A de rares exceptions près, comme le Canard enchaîné en France, ils ne sont pas rentables (p.3). Si les grands groupes de presse et les médias traditionnels restent un support pour la publication d’une certaine forme de watchdog journalism, ils n’en constituent pas l’apanage exclusif. L’hypothèse qu’ils formulent est que le journalisme d’enquête va se développer en dehors et parallèlement à cette industrie quitte à ce que cette dernière récupère dans un second temps le fruit de l’investigation. Ce sont des stakeholders medias qui seront les principaux commanditaires d’enquête au longs cours.

Mais qu’est ce qu’un stakeholder media, exactement ?

Le terme stakeholder provient du vocabulaire managérial et économique. La théorie de management que l’on appelle Stakeholder view consiste à considérer une corporation non pas à travers ses actionnaires (les shareholders) mais par le biais de celles et ceux qui en produisent la valeur, soit les acteurs qui  en sont les parties prenantes, les stakeholders. La notion a évolué pour désigner un organisme qui défend un intérêt pour une cause ou un projet. Les organisations non gouvernementales par exemple, portent assez bien l’étiquette stakeholder. Appliqué au monde des médias, le terme semble tout de suite désigner la presse d’opinion. Cette perspective est toutefois  réductrice et biaisée. Hunter et Wassenhove  désignent comme stakeholders des médias qui sont articulés autour d’une « communauté d’intérêt concernée par un sujet ou une cause » (p. 8).

La principale critique que les auteurs commencent par esquiver est celle de la crédibilité des informations portées par ce type de médias. On peut en effet se demander ce que valent les infos qui y sont déposées. Même au service d’une « bonne » cause, le travail journalistique serait invalidé par les présupposés et les intérêts du stakeholder qui y serait associé. Tel n’est pas le cas affirment les deux chercheurs. Ce type de médias n’est pas moins crédible que la presse d’opinion. Qui plus est, les médias stakeholders n’avancent pas masqués sous l’étiquette de l’objectivité – un point que je développerai dans le prochain billet- . Hunter et Wassenhove vont même plus loin. Ils constatent que même avant le début de la crise financière qui a touché les médias, ces derniers étaient en perte de crédibilité par rapport à leur public. Les chercheurs mentionnent notamment une intéressant sondage réalisé par la Sofres en janvier 2010. Ce dernier indique que 66% du public ne croit plus à l’indépendance des journalistes. ce pourcentage serait même en augmentation régulière. A partir de ce constat, on peut imaginer que le public ne fera pas moins confiance à un stakeholder qu’à un média traditionnel.

Des enquêtes financées par un tiers intéressé par le sujet

Ce n’est donc pas le positionnement idéologique du média qui en fait un stakeholder, mais plutôt l’intérêt qu’il porte à un sujet. On peut ainsi considérer des sites comme celui d’Amnesty International ou celui de Human Rights Watch comme des stakeholders. Cette dernière association a d’ailleurs produit plusieurs rapports sur des problématiques inhérentes aux droits de l’homme avec le concours de journalistes. De plus, Human Rights Watch vient de décrocher la timbale. Le financier-philanthrope George Soros vient de lui adresser une obole de 100 millions de francs. Nul doute que cet argent pourrait servir à financer des investigations onéreuses. Mais des médias au format plus « classique »  peuvent très bien rentrer dans cette catégorie. La Revue Durable par exemple, que l’on trouve aussi en format magazine, cherche aussi à fonder une communauté d’intérêt autour d’un sujet. Même chose du côté de Océan 71, un site internet qui s’intéresse au grand large et qui vient de lancer une enquête sur la pêche au thon rouge.

Plus généralement,  Les médias stakeholders se déclinent à travers différentes formes, via divers supports. Cela va du site internet à la newsletter en passant par l’imprimé ou la radio. Quoi qu’il en soit, ces médias se sont principalement développés grâce à l’émergence du web. Il faut également différencier ce type de médias des réseaux sociaux : » Twitter, Facebook, LinkedIn, ne constituent pas des médias stakeholders pour l’instant. Ils sont par contre utilisés par les stakeholders pour organiser leurs contacts et diffuser les alertes ». (p. 8 ). Les stakeholders vont donc permettre à de nouveaux nouveaux chiens de garde d’effectuer leur travail de veille et d’enquête.

Dénoncer les dysfonctionnements

Il est intéressant de constater que les auteurs font la différence entre les watchdogs journalists et les investigators. Tous les chiens de garde ne sont pas forcément de bons enquêteurs. L’investigation requiert des compétences, un réseau, et une certaine maîtrise de l’interview que les watchdogs ne maîtrisent pas obligatoirement. Cependant un bon journaliste d’investigation remplit quasi automatiquement la fonction de watchdog, selon Hunter et Wassenhove. Il vaut la peine de s’arrêter également un instant sur ce terme de watchdog. L’expression Chien de garde, en français, est fortement connotée, notamment après la parution de l’ouvrage de Serge Halimi (S. Halimi, Les nouveaux chiens de garde, Seuil, 1997). Dans cet ouvrage, les chiens de garde sont les journalistes et les représentants d’une sphère médiatique au service du pouvoir et des groupes économiques. En France, Le chien aboie pour les puissants. La sociologue des médias Géraldine Muhlmann s’est déjà étonnée de la connotation beaucoup plus positive que trouve le terme auprès des médias anglo-saxons et plus particulièrement américains. Il y désigne une pratique journalistique qui s’intéresse de près aux rouages du pouvoir et qui n’hésite pas à dénoncer les dysfonctionnements et les abus de ce dernier. Le watchdog journalism se développe au cours des décennies 1960 et 1970 et connait son heure de gloire avec le scandale du Watergate. De l’autre côté de l’Atlantique, le chien aboie pour les citoyens. Peut-être est-il temps de se de réapproprier le terme sur le vieux Continent et de le doter d’une connotation plus positive ?

Le financement d’enquêtes par ce type de médias suscite quelques ruptures par rapport à la pratique journalistique. Les chercheurs en dénombrent au moins trois qu’ils mentionnent dans leur recherche et que je développerai dans des billets à venir en prenant des exemples concrets  :

1. On assiste au au développement d’un nouveau cadre théorique de l’éthique journalistique.

2. Le contenu des investigations ne consiste plus en un « produit » mais en un « service ».

3. La réorientation du marché se concentre non plus sur le « public » mais s’adresse à une « communauté ».

A suivre…

Article initialement publié sur Chacaille

Illustrations CC FlickR : ~BostonBill~

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Métier: journaliste héroïque http://owni.fr/2010/06/17/metier-journaliste-heroique/ http://owni.fr/2010/06/17/metier-journaliste-heroique/#comments Thu, 17 Jun 2010 15:54:55 +0000 Isabelle Otto http://owni.fr/?p=19129 Un exemple britannique

Ami lecteur, me revoilà, toute pimpante et revigorée ! Oui, j’ai passé une semaine merveilleuse à lire des blogs de journalistes défendant les blogueurs, de blogueurs-stars se la jouant modeste et défendant les blogueurs médiocres, de blogueuses sensuelles défendant les blogs pour tous, journalistes ou pas.

J’aime être rassurée, entendre que mon blog minable est beau et désirable et qu’il y a un but profond à mes élucubrations parfois délétères. Bon pour mon égo tout ça. Voui voui voui. Le merci !

Journalistes sérieux, je vous kiffe

Mais bon, ça va bien cinq minutes. Si je respire un bon coup et que j’utilise le neurone qui me reste après avoir essayé d’installer Google Analytics, je dois en déduire qu’il me faut de toute urgence écrire un billet à la gloire du journalisme. Oui, le Huffington Post et tout ça, c’est bien pour remplir le creux d’une dent, mais il faut bien admettre que ça flirte avec le nul quand même. Prétendre faire de l’info avec une équipe journalistique rachitique, c’est de la SF ou du SM. Ça fait du fric, me direz-vous: il y a donc quelque chose de bon à en tirer -> du jus de soussous.

Puis, les blogs indépendants, journaleux ou pas, j’adore, croyez-moi, mais comme on aime un bon vin pour accompagner de la grande cuisine. Et boire du vin sans manger, c’est mauvais pour la santé.

Pour me nourir, moi, je veux du billet long du New-Yorker, de l’enquête du New-York Times, de l’article de fond du Monde, et des couvertures sans filles à poil de Wired (etc). Journalistes sérieux, je vous kiffe, et j’invite fermement le reste du monde à faire de même. Educateurs des masses, transistors des ondes du monde qui bouge trop vite, porte-voix des gentils et des vilains, phares dans la tempête. Vision idéaliste ? Pas du tout, voyons, que du contraire ! J’en rajoute une couche, tiens ! Parfois, journalistes, vous êtes tout bonnement héroiques, si héroiques que vous changez le monde. Et voici un bel exemple.

L’exemple du scandale des notes de frais au Royaume-Uni

Trois journalistes peuvent être crédités d’avoir déterré, et rendu public au printemps 2009, le scandale absolu qu’était la manière dont les Membres du Parlement (MPs) britannique se rémunéraient eux-mêmes. En faisant cela, ils ont changé la donne des dernières élections législatives, et probablement de toutes les élections qui vont suivre. Mais surtout, ils ont forcé la Grande-Bretagne à commencer d’évaluer son déficit démocratique. Chapeau !

Voyez-vous, ces petits coquins de MPs, plutôt que d’adopter une loi impopulaire augmentant publiquement et légalement leur salaire, s’étaient concoctés un petit système de remboursement de notes de frais pas piqué des vers. Tout cela était bien hush-hush, personne n’en savait rien sauf eux. Certains avaient même soutenu qu’il aurait été destructif de modifier ce système, car plus personne ne voudrait plus se présenter comme MP s’il n’y avait pas de petits a-coté juteux si le public pouvait pénétrer dans leur sphère privée en obtenant leurs notes de frais.

Puis, en 2005, le Freedom of Information Act est entré en vigueur, donnant accès, sur demande, aux documents émis par des institutions publiques. Trois journalistes ont immédiatement fait des requêtes de documents à la House of Commons (chambre basse du Parlement) sur les notes de frais des MPs. Leurs noms: Heather Brooke, free-lance  l’époque, Ben Leapman du Daily Telegraph et Jonathan Ungoed-Thomas du Sunday Times. Leur achèvement est tellement immense que la BBC en a fait un film, diffusé en février cette année. Leur combat a pris des années: ils se sont pris moult portes dans la figure et ont dû entamer une action en justice. Entretemps, la House of Commons a même tenté a deux reprises de s’exempter du Freedom of Information Act. Un comble du genre ! ”Fais ce que je dis mais ne fais pas ce que je fais”. Puis, les journalistes ont gagné, et tout est sorti dans le Daily Telegraph.

Sans la mise en lumière de ces abus, il est probable que les LibDems auraient obtenu beaucoup moins de voix aux élections du 6 mai, et qu’il y aurait eu un gouvernement majoritaire bien fort. Beaucoup plus de “vieux de la vieille” seraient restés au Parlement, qui ont dû être remplacés à la dernière minute par leurs partis parce qu’ils s’étaient rendus trop impopulaires avec leurs abus de notes de frais. En somme, il s’agit là d’une belle bouffée d’air démocratique. Espérons que ça dure .

Heather Brooke est considérée comme la chef de file du combat pour obtenir la transparence du Parlement britannique, parce qu’elle y a passé le plus de temps et mis le plus de moyens. Elle mérite d’être présentée:

Heather Brooke, activiste du manque de transparence

Il était une fois une jeune femme nommée Heather Brooke. Elle était née aux Etats-Unis de parents britanniques, et était devenue journaliste, d’abord à Olympia, dans l’Etat de Washington, puis en Caroline du Sud. A la fin des années 90, après avoir couvert plus de 300 meurtres pour le Spartanburg Herald-Journal, elle était vannée, et décida de rejoindre son père, qui était reparti vivre au Royaume-Uni après la mort de sa femme.

C’est le merveilleux article du New-Yorker du 7 juin 2010, Party Games, dont vous pouvez trouver un extrait ici, qui m’a fait redécouvrir Heather, dont j’avais vaguement entendu le nom l’an dernier, quand le scandale des notes de frais des parlementaires britanniques avait été mis à jour.

Lorsqu’elle était journaliste aux Etats-Unis, Heather faisait souvent des requêtes de documents publics, et avait pris l’habitude… de les obtenir facilement.

Après son arrivée au Royaume-Uni, c’est un problème dans son voisinage qui lui a fait découvrir le manque de transparence (euphémisme) des institutions locales et nationales. Précisons quand même que pour gérer ce problème de voisinage, elle a utilisé tous les trucs qu’elle avait appris en tant que journaliste pro.

En 2003, une jeune femme avait été assassinée dans son parc local, et Brooke avait demandé à la police et aux autorités locales des informations chiffrées sur les crimes similaires dans le quartier. Elle y mis beaucoup de temps, de patience et d’énergie et obtint… que dalle. Puis, plutôt que de devenir gaga et de broyer du noir, elle décida d’écrire un livre expliquant aux britanniques comment utiliser le Freedom of Information Act qui allait entrer en vigueur deux ans plus tard.

De là à s’intéresser aux notes de frais des parlementaires, il n’y avait qu’un pas. Grâce à son succès dans ce combat, elle a obtenu plusieurs prix, et a pu écrire son nouveau livre “The Silent State”.

Voilà, c’était ma modeste présentation d’un bien joli combat pour la transparence, et contre la condescendance des élites gérant le pays. Un combat mené par des journalistes, et il y a plein d’autres exemples.

Journalistes : continuez, moi, je ne peux pas vivre sans vous.

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Billet originellement publié sur La Patrouille Internationale.

Crédits Photo CC Flickr : Ashley Rosex, Levork.

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Des datas d’utilité publique sous la blouse http://owni.fr/2010/05/04/des-datas-dutilite-publique-sous-la-blouse/ http://owni.fr/2010/05/04/des-datas-dutilite-publique-sous-la-blouse/#comments Tue, 04 May 2010 15:52:37 +0000 Théo Haberbusch http://owni.fr/?p=11988 Les journalistes français sont-ils si mauvais ? se demande, dans un ouvrage récent, François Dufour, rédacteur en chef de Mon quotidien et ex vice-président des États généraux de la presse écrite. Je reviendrai bientôt en détail sur ce stimulant essai, mais je peux vous donner la réponse de François Dufour : oui, les journalistes français sont mauvais. Je ne souhaite pas reprendre en bloc ce jugement. Mais il est certain que les journalistes français démontrent  régulièrement des faiblesses inquiétantes. Plutôt que de pointer tel ou tel raté, je voudrais souligner notre marge de progression, en vous racontant l’histoire d’une enquête exemplaire. Pas de chance, elle n’a pas été réalisée chez nous.

Une fois n’est pas coutume, je vous invite à prendre l’avion pour traverser l’Atlantique. Direction la Californie. Là-bas, deux journalistes  ont réalisé un travail de dix-huit mois  et publié une enquête (commune au Los Angeles Times et à Pro Publica) de haute volée sur la façon dont étaient (ou plutôt n’étaient pas) sanctionnées les infirmières coupables de fautes ou de négligences professionnelles.

Enquête fondée sur des statistiques

Charles Ornstein et Tracy Weber, auteurs de l'enquête

Charles Ornstein et Tracy Weber, auteurs de l'enquête

C’est sur la méthode des deux journalistes que j’aimerais m’attarder. Ils se sont d’abord procuré une liste des infirmières ayant fait l’objet d’une procédure disciplinaire depuis 2002. À partir de là, ils ont consulté leurs dossiers disciplinaires, disponibles en ligne. Et ont remarqué dans plusieurs cas que les sanctions mettaient beaucoup de temps à être prises. Un infirmier condamné pour tentative de meurtre s’est ainsi vu renouveler son autorisation de pratiquer alors qu’il était en prison !

Mais il y a une différence entre un papier basé sur des anecdotes et une enquête fondée sur des statistiques. C’est pourquoi nos deux enquêteurs ont entré chaque cas d’infirmière faisant face à une procédure disciplinaire (2 400 en tout) dans une base de données. Y figure le nom de la personne, de ses employeurs, la date de la procédure et le type de sanction prises à son encontre, y compris dans différents États.

Une fois ces informations renseignées et consolidées, les reporters ont pu établir de façon chiffrée, donc  formelle, qu’en Californie, près de 100 infirmières considérées comme des dangers publics avaient pu continuer à pratiquer en raison des négligences du California nursing board, instance de régulation de la profession.

Une autre exploitation de la base de données met en évidence le fait que le California nursing board a mis en moyenne treize mois pour engager des poursuites à l’encontre de quelque trois cents infirmières déjà condamnées (licence révoquée ou suspendue) dans d’autres États.

Impact politique garanti

Impact garanti : après la publication de l’enquête, le gouverneur Arnold Schwarzenneger a remplacé dans les 48 heures la majorité du California nursing board, dont le président a démissionné.

Pour ceux qui sont intéressés par cette enquête, tout est en ligne, expliqué par le menu, mieux que je ne saurais le faire. Car le summum de la classe des deux reporters américains et de Pro Publica est d’avoir rendue publique leur « recette » pour réaliser l’enquête. Leur but : que leurs confrères d’autres États, qui disposeraient de moins de temps et de moyens, puissent la reproduire ! Il s’agit là d’une forme de journalisme collaboratif, qui pourrait permettre de donner à leur enquête une dimension nationale, si d’autres journalistes s’en saisissent.

Ce que nous pourrions en tirer en France

Quant à nous, qui passons en France beaucoup de temps à débattre de l’avenir du journalisme, voilà qui devrait nous remettre les idées en place. Plutôt que de pinailler sur l’intérêt ou non du « datajournalism » sans le pratiquer, plutôt que de nous demander si notre avenir est « entrepreunarial », plutôt que de débattre pour savoir s’il faut tweeter les résultats des régionales , ou encore plutôt que de disserter sur le futur de notre profession, mieux vaudrait se mettre au boulot.

Le chemin est clair. Ne pas avoir peur de nous confronter à des problèmes nouveaux. Mettre à l’épreuve notre méthodologie. Apprendre à manier les outils de gestion de base de données (Access, Excel). Et appliquer tout cela à des sujets qui parleront forcément à nos concitoyens : qui oserait dire qu’une enquête sur la santé en France (les hôpitaux, les maisons de retraite, les infirmières), plus ambitieuse que le simple reportage, ne trouverait pas d’écho ?

Quand la presse spécialisée se saisit des chiffres

Il ne s’agit pas de vœux pieux. Il est possible de s’y mettre, même modestement. J’ai par exemple réalisé (poussé et guidé par mon rédacteur en chef de l’époque  et avec l’aide de collègues) il y a quelque temps trois enquêtes de ce type. L’une visait à dresser le portrait-robot des présidents d’université (âge, sexe, conditions d’élection, responsabilités antérieures…) au moment où le gouvernement leur accordait l’autonomie. Nous avons réitéré l’enquête un an après pour voir si des évolutions étaient à noter.
L’autre enquête, dans le même contexte de passage à l’autonomie, portait sur les moyens dont disposaient les universités. Nous avions calculé des ratios (qui ont d’ailleurs été débattus ensuite avec l’administration) éclairants sur un sujet d’intérêt général, l’éducation : taux d’encadrement par étudiant, budget par étudiant, poids des différents financeurs dans le budget des établissements…

Ce travail, fondé sur des données essentiellement publiques, a fait du bruit dans le landerneau, mais il est resté le fait d’une publication spécialisée. Pourquoi donc aucun journal, aucun magazine français ne tente-il jamais ce type d’investigation, si ce n’est sur des sujets éculés comme les classements salariaux, de grandes écoles… ?

La manipulation de chiffres et de données sérieuses nous ferait-peur ? Le recueil de témoignages et le commentaire de l’actualité seraient-ils des pratiques plus confortables ?

À moins que je ne sois passé à côté d’initiatives en ce sens en France ? Si oui, faites le moi savoir !

Article initialement publié sur Monjournalisme.fr sous le titre “Journalistes, les infirmières californiennes peuvent vous faire aimer les chiffres !”

Photo CC Flickr amayzun

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Les journaux tels que nous les connaissons: un “accident historique” ? http://owni.fr/2010/04/15/les-journaux-tels-que-nous-les-connaissons-un-accident-historique/ http://owni.fr/2010/04/15/les-journaux-tels-que-nous-les-connaissons-un-accident-historique/#comments Thu, 15 Apr 2010 10:00:58 +0000 Marie-Claude Ducas http://owni.fr/?p=12378 Le business model de la presse traditionnelle s’est construit dans un contexte qui ne se reproduira plus explique Clay Shirky. Il se montre du coup très pessimiste sur l’avenir du journalisme “chien de garde”.

Je m’étais déjà promis de relayer ce point de vue, mis de l’avant récemment sur Six Pixels of Separation, le célèbre blogue du non moins célèbre Mitch Joel, président de Twist Image. Et, alors que l’on vient d’apprendre de CanWest Global, qui possède entre autres le réseau de télévision Global, The National Post, et plusieurs autres quotidiens dont The Gazette à Montréal, vient de placer certaines de ses divisions sous la protection de la loi de la faillite, cela tombe (hélas) d’autant plus à point nommé. The Gazette ne fait pas partie des divisions incluse dans cet arrangement, mais, comme les autres quotidiens de la chaîne, il est en difficulté, et a évité une grève il y a quelques mois.

Pour contexte, rappelons que, ici, Le Journal de Montréal, propriété de Quebecor, est en lock-out depuis dix mois ; que la direction de La Presse (Gesca) a récemment brandi une menace de fermeture si aucune entente avec ses employés quant à des coupures n’était conclue d’ici le premier décembre ; que les autres quotidiens de Gesca doivent aussi faire face à des restrictions, de même que d’autres entreprises de média ici. Et, ailleurs au Canada et en Amérique du Nord, les exemples du genre se multiplient.

Et, c’est maintenant clair pour tout le monde, la récente récession est loin de tout expliquer : c’est tout le modèle d’affaires des médias traditionnels qui est remis en question. Et, en ce qui concerne les journaux, la remise en question touche directement la question de l’information : qui elle intéresse, qui elle rejoint… et surtout ce qu’il en coûte pour la produire, et qui est prêt à financer cela. Pour les journaux, en effet c’est l’information qui compose l’essentiel du contenu.

Le point de vue relayé par Mitch Joel est celui de Clay Shirky, énoncé, récemment lors d’une conférence du Shorenstein Center on the Press, Politics and Public Policy, un organisme lié à l’université Harvard. J’avoue que je ne connaissais pas Clay Shirky, auteur d’un best-seller intitulé Here Comes Everybody: The Power of Organizing Without Organizations. Mais je me promets bien d’aller lire davantage ce qu’il a écrit.

Clay Shirky :

Photo CC Flickr chéggy

En ce qui concerne les journaux, on pourrait résumer ainsi un des principaux points mis de l’avant par Shirky dans sa conférence : le présent modèle d’affaires des journaux, où des entités commerciales financent massivement la production de quelque chose qui, finalement, s’apparente davantage à un service public, est une sorte d’accident historique, maintenant voué à disparaître. Je vais tenter de résumer le mieux possible ce qui émerge de son point de vue, et faire ressortir les implications que je vois pour ce qui se passe ici. Mais j’incite fortement quiconque est le moindrement intéressé par ces questions à aller lire les propos de Clay Shirky, qui ont été reproduits intégralement sur le blogue du Nieman Journalisme Lab, un autre organisme lié à Harvard (d’ailleurs, pour ceux qui sont davantage « auditifs », il y a aussi un lien vers la version audio). Croyez-moi quand je vous dis que c’est du temps que vous n’aurez pas gaspillé… quoique, si vous êtes moindrement concernés par l’avenir des journaux, ou par tout ce qui touche à l’information et au rôle du journalisme, c’est un point de vue qui risque de vous déranger.

Voici déjà une citation : « Some time between the rise of the penny press and the end of the Second World War, we had a very unusual circumstance — and I think especially in the United States — where we had commercial entities producing critical public goods. We had ad-supported newspapers producing accountability journalism. Now, it’s unusual to have that degree of focus on essentially both missions – both making a profit and producing this kind of public value. But that was the historic circumstance, and it lasted for decades. But it was an accident. There was a set of forces that made that possible. And they weren’t deep truths – the commercial success of newspapers and their linking of that to accountability journalism wasn’t a deep truth about reality. Best Buy was not willing to support the Baghdad bureau because Best Buy cared about news from Baghdad. They just didn’t have any other good choices. »

[« Quelque part entre l’avènement de la presse de masse et la fin de la Seconde Guerre mondiale, on était face à des circonstances très particulières, surtout aux États-Unis, où des acteurs privés produisaient des biens publics indispensables. On avait des journalistes financés par la publicité qui jouaient un rôle de chien de garde. De nos jours, il est rare de voir une organisation qui se concentre autant sur ces deux problèmes : dégager un profit et produire ce genre de bien public. Ce furent des circonstances exceptionnelles et elles durèrent plusieurs décennies. Mais c’était un accident. Il y avait un ensemble de forces qui ont rendu ça possible. Cela n’avait rien à voir avec une réalité profonde – le modèle d’affaires du journalisme ‘chien de garde’ n’était pas lié à une réalité du marché. Wal Mart ne payait pas pour un correspondant à Bagdad parce qu’ils en avaient envie. Ils n’avaient tout simplement aucune autre option. »]

Ce qui a permis aux journaux de pouvoir de maintenir une politique d’indépendance rédactionnelle face aux annonceurs, soutient Shirky, c’est qu’ils étaient, en quelque sorte, en situation de monopole : « The advertisers were not only overcharged, they were underserved. Not only did they have to deliver more money to the newspapers than they would have wanted, they didn’t even get to say: “And don’t report on my industry, please.” There was a time when Ford went to The New York Times during the rollover stories and said, “You know, if you keep going on this, we may just pull all Ford ads in The New York Times.” To which the Times said, “Okay.” And the ability to do that — to say essentially to the advertiser, “Where else are you going to go?” — was a big part of what kept newspapers from suffering from commercial capture. »

« Non seulement les annonceurs payaient trop cher, mais ils étaient aussi très mal servis. Non seulement devaient-ils payer plus qu’ils auraient voulu, ils n’avaient pas non plus le droit de dire ‘Et pas un mot sur mon entreprise, s’il vous plait’. Une fois, Ford est allé voir le New York Times pendant une crise liée au renversement des 4×4 et dit ‘Vous savez, si vous continuez comme ça, on retire les pubs Ford du NYT’. Le Times répondit simplement : ‘OK’. La possibilité de faire ça, de dire à l’annonceur ‘Vous allez aller où ?’ a joué un grand rôle dans la santé financière des journaux. »]

Photo CC Flickr chéggy

Mais cette époque est bel et bien terminée : « The institutions harrying newspapers — Monster and Match and Craigslist — all have the logic that if you want to list a job or sell a bike, you don’t go to the place that’s printing news from Antananarivo and the crossword puzzle. You go to the place that’s good for listing jobs and selling bikes. And so if you had a good idea for a business, you wouldn’t launch it in order to give the profits to the newsroom. You’d launch it in order to give the profits to the shareholders. »
[« Les institutions qui harcèlent les journaux – les Monster, Meetic et Craigslist – fonctionnent tous de la même manière. Si vous voulez passer une annonce emploi ou vendre un vélo, vous n’avez pas besoin d’aller voir ceux qui impriment les dernières actus sur Tananarive ou les mots croisés. Vous allez là où on passe les annonces emplois ou là où on vend des vélos. Et si vous avez une bonne idée de plan d’affaires, vous n’allez pas partager les profits avec une rédaction. Vous allez donner les profits à vos actionnaires. »]

Alors voilà. Il y a d’autres aspects, à commencer par la pertinence, ou non, de faire payer pour du contenu, sur lesquels je reviendrai certainement. Mais voici, pour finir, ce qu’il a à dire en ce qui concerne le journalisme tel qu’on s’est habitués à le connaître : « I think a bad thing is going to happen, right? And it’s amazing to me how much, in a conversation conducted by adults, the possibility that maybe things are just going to get a lot worse for a while does not seem to be something people are taking seriously. But I think this falling into relative corruption of moderate-sized cities and towns — I think that’s baked into the current environment. I don’t think there’s any way we can get out of that kind of thing. So I think we are headed into a long trough of decline in accountability journalism, because the old models are breaking faster than the new models can be put into place. »

[« Je pense que quelque chose de terrible va arriver. Et ça me semble incroyable à quel point, dans une conversation entre adultes, les gens ne prennent pas au sérieux la possibilité que les choses vont sérieusement empirer pendant un certain temps. J’ai l’impression que cette descente vers plus de corruption dans les petites et moyennes villes est en gestation dans l’environnement actuel. Je vois pas comment on pourrait y échapper. C’est pourquoi j’ai le sentiment que l’on se dirige vers un long déclin du journalisme ‘chien de garde’, étant donné que les anciens modèles s’écroulent plus vite que les nouveaux se construisent. »]

À ma lecture, lundi soir dernier, ce dernier passage m’avait particulièrement frappée : je n’avais jamais vu, auparavant, remettre en question de façon aussi limpide – on pourrait même dire aussi crue – la survie du journalisme tel qu’on le connaît, et de la fonction qu’il remplit.

Et voilà que je lis, aujourd’hui dans la section « Forum » du journal La Presse (page A20), une opinion, signée par un ex-conseiller municipal de la ville de Trois-Rivières. Il y est question de favoritisme en ce qui concerne l’attribution de contrats d’architecture ; et l’auteur plaide pour l’instauration d’une fonction de commissaire à l’éthique pour les villes. Mais c’est le passage suivant qui m’intéresse : « Qu’en est-il dans ces villes qui n’ont pas toujours de partis de l’opposition structurés, de journalistes d’enquête ou de médias indépendants, qui peuvent dénoncer des situations sans craindre de perdre LE gros contrat de publicité ou la publication des avis publics avec la Ville ? » Et de quoi parlait Clay Shirky, déjà ? « … this falling into relative corruption of moderate-sized cities and towns… » Ouch.

Billet initialement publié sur le blog de Marie-Claude Ducas sous le titre L’avenir des journaux: un point de vue brillant… mais dérangeant ; traduction des citations : Nicolas Kayser-Bril

Sur la renaissance du journalisme d’investigation grâce à des médias non-profit : ProPublica remporte un Pulitzer: la fin de l’hypocrisie d’une information “for profit”?

Photo CC nc-by noodlepie

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Quatre voies du datajournalism http://owni.fr/2010/04/07/quatre-voies-du-datajournalism/ http://owni.fr/2010/04/07/quatre-voies-du-datajournalism/#comments Wed, 07 Apr 2010 10:27:56 +0000 Caroline Goulard http://owni.fr/?p=11781 J’ai eu l’impression, ces derniers jours, de répéter plusieurs fois la même chose à des personnes différentes (ce qui est un vrai plaisir quand il s’agit de datajournalism). D’où l’idée d’articuler ici ces quelques éléments récurrents.

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Photo CC par Ian-S sur Flickr

Finalement, le datajournalism ou journalisme de données, peut difficilement se résumer à un type de contenus ou à un type de démarche. J’ai identifié quatre dimensions, et pour chacune les compétences nécessaires à sa mise en œuvre :

1-COMPRÉHENSION : le datajournalism permet de mieux comprendre le monde.

Pour cette visualisation des succès au box office américain depuis 1986, l’équipe du nytimes.com a particulièrement travaillé sur la forme des courbes, et leur couleur.

Le datajournalism, c’est de la visualisation d’information. C’est une des composantes du traitement rich media (tel que le définit Alain Joannes), une des applications du journalisme visuel. Dans cette première logique, le datajournalism permet de faire comprendre par l’image certaines idées bien mieux que ne le feraient des mots.

Le datajournalism fait ici appel aux compétences des graphistes et aux connaissances en sémiotique visuelle ou en sémiologie graphique : pour que chaque forme et chaque couleur fassent sens instantanément.

Pour faire comprendre une affaire d’espionnage politique à Madrid, elpais.com a mis au point une visualisation animée et interactive.

Mais le datajournalism va au delà de l’infographie car il ne s’adresse pas uniquement à l’intelligence visuelle, il travaille également sur l’intelligence cinétique. En datajournalism la visualisation est forcément interactive. Elle doit permettre à l’internaute de jouer avec les données, de manipuler la visualisation. Plongé dans une posture active, l’usager appréhende et mémorise plus facilement l’information.

La datajournalism ne pourra donc pas se passer des compétences d’un interaction designer. Ni de celles d’un ergonome.

2.PERSONNALISATION : le datajournalism permet de personnaliser la vue sur le monde

Gapminder permet de visualiser à la demande les relations entre différents indicateurs statistiques mondiaux.

Le datajournalism, c’est aussi de l’information à la carte. Un des moyens de répondre à la fragmentation des audiences.

La visualisation de données consiste à bâtir une interface graphique pour accéder à une base de données. Cela permet bien sûr de proposer un aperçu de gros volumes de données, d’en faire jaillir le message essentiel.

Mais cela ouvre également la possibilité d’interroger n’importe quelle partie de cette base de données, et de la rendre accessible et compréhensible instantanément. Ainsi, une des dimensions de l’interactivité consiste à rendre la visualisation librement paramétrable.

Une application de datajournalism peut alors répondre à toutes les attentes particulières des internautes autour d’un thème d’information.

Les savoir-faire d’un architecte de l’information deviennent ici utiles.

3.INVESTIGATION : le data journalisme permet d’éclairer autrement le monde.

En analysant un document de 458 000 pages sur les notes de frais des députés britanniques, le Guardian a révélé des abus dans l’utilisation des fonds publics britanniques.

Le datajournalism est également un outil d’investigation. Les bilans de la Cour des comptes, les rapports du FMI, les statistiques de l’OCDE, etc., contiennent énormément de matériaux pour le journalisme d’investigation. Seulement, il faut savoir faire parler ces données.

C’est-à-dire qu’il faut prendre le temps de les lire, qu’il faut savoir les interpréter, qu’il faut des outils pour appréhender des tendances à partir de gros volumes de données, qu’il faut avoir l’idée de croiser une base de données avec une autre, etc., pour faire apparaître des informations jusque-là ignorées.

Interroger les données plutôt que les témoins est un art encore très délaissé par les médias français. Peut-être parce que cela suppose d’emprunter des outils et des méthodes aux sciences (voir l’article de RWW France) : pour extraire de l’information d’immenses bases de données, il n’y pas d’autres moyens que de construire des modélisations, que d’utiliser des outils de gestion de la complexité.

Impossible de réaliser ce genre d’investigation sans statisticiens.

4.PARTICIPATION : le datajournalism permet de participer à la description du monde

Avec l’aide de 200 internautes, l’équipe d’Owni.fr a géolocalisé les bureaux de votes français et a rendu cette base de données gratuite, ouverte et libre.

Enfin, le datajournalisme suppose parfois de faire appel au crowdsourcing pour collecter les données et pour les qualifier.

Lorsque la base de données n’existe pas, lorsqu’il est matériellement impossible qu’un petit groupe de personnes collecte toutes les données sur un sujet, la force du datajournalism réside dans sa capacité à fédérer la participation des internautes pour obtenir des données à faire parler.

Cela nécessite un gros travail d’animation de communauté.

Il faut encore mentionner deux compétences indispensables au datajournalism, et transversales à ces quatre dimensions.

Tout d’abord les savoir-faire des développeurs. Développeur axé back office et data, pour construire et gérer les bases de données, mais aussi développeur axé animation, flash, et front office.

Et pour finir, pas de datajournalism sans travail d’éditorialisation.

Par éditorialisation j’entends : problématisation, inscription dans le débat public, storytelling, hiérarchisation, définition d’un angle de traitement de l’actualité et d’un message à délivrer. Vous remarquerez que l’esquive volontairement la référence au journalisme.

Je suis persuadée qu’il n’y a pas besoin de se définir comme journaliste pour être capable de remplir ce rôle d’éditorialisation.

Maintenant, est-ce que ce travail d’éditorialisation est du journalisme? Je vous laisse en débattre.

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Journalistes en 2010 http://owni.fr/2010/02/01/journalistes-en-2010/ http://owni.fr/2010/02/01/journalistes-en-2010/#comments Mon, 01 Feb 2010 15:33:03 +0000 Guillaume Ledit http://owni.fr/?p=7499 Cliquer ici pour voir la vidéo.

Que sera le journalisme en 2010 ? Dans quel écosystème s’intégrera-t-il ? Quel sera la place des journalistes en son sein ?

Toutes ces questions, les futurs journalistes interrogés par The Nation se les posent déjà. Ils tentent ici d’apporter des éléments de réponse. Si l’une considère que le journaliste de 2010 se devra de savoir tout faire, une autre considère qu’il devra se spécialiser sur un sujet, et apprendre par la suite à le diffuser au mieux.

L’importance du journalisme d’investigation est souligné par l’un des intervenants. Pour ce faire, il faut veiller à maintenir des médias indépendants.

Internet et les technologies comme le kindle et l’Ipad sont évidemment évoqués, pusiqu’ils remettent en cause la chaîne de distribution de l’information.

Pour le dernier journaliste en herbe, l’une des pistes intéressantes peut être la vidéo, notamment en cela que le format est facilement monétisable.

La conclusion est également intéressante : l’idée développée par la jeune journaliste est que l’on s’apprête à connaître un changement dans le contenu même de l’information, permettant à des minorités d’accéder au flux d’information “mainstream”, modifiant ainsi la structure de ce dernier.

Via l’observatoire des médias , @gillesbruno /-)

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